Le Blog de l'Association CONVERGENCE : Idées reçues sur l’économie sociale et solidaire

vendredi 26 octobre 2012

Idées reçues sur l’économie sociale et solidaire

L’Economie sociale et solidaire (ESS) est un secteur économique performant, et source de multiples innovations. La création d’un Ministère délégué à l’ESS a consacré l’essor de ces structures dont la singularité est d’allier utilité sociale et efficacité économique. Pourtant, dans l’imaginaire collectif, l’ESS est souvent assimilée à "un secteur éloigné des réalités économiques", ou "une alternative parmi tant d’autres". Il est donc important de déconstruire certaines idées reçues sur l’ESS. En voici une première série.

Idée reçue n°1 : "L’Economie sociale et solidaire est marginale"

FAUX : Avec 2,3 millions de salariés, l’ESS représente plus de 10% de l’emploi en France. Il s’agit d’un secteur dynamique, qui génère 100 000 emplois sont chaque année. Entre 2006 et 2008 le taux de croissance de l’emploi au sein des structures de l’ESS est de 2,4% en moyenne contre 1,8% pour le secteur privé. En 2010, il enregistrait encore une progression de 2% quand le secteur privé ajoutait un repli de 0,7%. - Source : Panorama 2010 de l’économie sociale et solidaire, CNCRES, Economie sociale : bilan de l’emploi en 2011 | Bilan national et bilan dans les régions.
Avec 800 000 entreprises sur le territoire français, l’ESS est de fait un secteur essentiel à l’activité économique du pays. Les coopératives agricoles, par exemple, représentent 40% de l’agroalimentaire français avec des marques reconnues (Yoplait, Banette, Delpeyrat, etc.). Trois entreprises coopératives (E. Leclerc, Système U, In Vivo) font partie du Top 100 des entreprises françaises hors banques. - Source : Les entreprises coopératives, acteurs du développement économique, octobre 2010, CoopFr

Idée reçue n°2 : "L’ESS repose sur les subventions étatiques"

FAUX : Nombre de structures de l’ESS fonctionnent sans ou avec peu de soutien de l’Etat et s’inscrivent dans le domaine marchand.
Pour les structures soutenues par l’Etat, le retour sur investissement de l’Etat est plus que très positif et source d’économies pour les comptes publics. Grâce à leur objectif d’utilité sociale, les structures de l’ESS prennent directement en charge de nombreux services (aide aux personnes, dépenses liées au surendettement, problèmes de santé, hébergement d’urgence…), que l’Etat n’a ainsi plus à financer. Par exemple, Actavista, un chantier d’insertion par la réhabilitation de monuments historiques, "réaliserait ainsi une économie de 8 000 euros par salarié et par an, soit un retour sur investissement moyen de l’argent public de 60 %". - Source : étude Ashoka-Mc Kinsey 2012
De plus, les entreprises privées sont assez largement subventionnées par l’Etat : les derniers chiffres publiés par l’IGF dans un rapport de 2007 indiquaient un chiffre de 65 milliards d’euros de subventions publiques pour les entreprises privées. Dans le plan de relance 2009-2010, 35 milliards d’euros ont été ajoutés à ce montant (contre 24 milliards d’euros prévus initialement).

Idée reçue n°3 : "L’ESS est éloignée des réalités économiques"

FAUX : Au contraire, les acteurs de l’ESS ont une approche économique sur le long terme, contrairement aux acteurs du monde économique actuel. Ils investissent dans des projets viables et durables, orientés vers le bien commun et non vers le profit.
Ce modèle les a protégés et les structures de l’ESS sont moins touchées par la crise que le reste de l’économie. En 2010, les 100 premières entreprises coopératives ont réalisé un chiffre d’affaires cumulé de 188 milliards d’euros, filiales comprises, soit une augmentation de 4% par rapport à 2008 dans un contexte de crise ; le nombre d’emplois au sein de ces entreprises a augmenté à même hauteur. - Source : Panorama 2010 de l’économie sociale et solidaire, CNCRES).
Autre exemple : dans un contexte de crise, l’épargne solidaire a poursuivi son essor à un rythme soutenu (+ 15,1 %) alors que le CAC 40 accuse une baisse de 17 % en 2011. La finance solidaire affiche, début 2012, un encours de 3,55 milliards d’euros - Source : Chiffres Finansol sur la finance solidaire
http://www.lelabo-ess.org/?Idees-recues-sur-l-economie .

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Editor's Note

L’HUMAIN : Ce qui restera quand on aurons tout consommé…

Hatem JAMOUSSI

L’économie mondiale est demeurée longtemps dominée par la poursuite du gain. C’est ainsi que des territoires entiers ont été forcés d’obéir au bon vouloir d’une poignée d’individus et des populations entières ont été asservies aux décisions d’une minorité, sévissant pour l’argent et par l’argent, s’accaparant les richesses, au mépris des préoccupations sociales et de l’équilibre fragile de la planète, mais surtout au préjudice d’une population impuissante, incapable de prendre son destin en main.

Avec le colonialisme, des envahisseurs venus de loin avaient dépouillé des peuples entiers de leurs richesses et avaient grossi les caisses de leurs pays respectifs avec les biens spoliés. De nos jours, la relève est assurée –quoique différemment– par les grands conglomérats mercantilistes, pour qui la population ne représente qu’un nombre arithmétique de consommateurs potentiels, qu’ils s’évertuent à attirer, voire à enliser dans un consumérisme savamment entretenu et judicieusement orchestré. Pour ce faire, tant pis si les valeurs humaines seront encore (et toujours) sacrifiées, jusqu’à devenir les souffre-douleurs d’une décadence éthique acharnée occultant le social, au point de souffrir le martyre de l’irrespect des cultures et du déni de tout droit à la différence, ce qui a annihilé la diversité (humaine et autre) et tenté d’étouffer le besoin le plus irréductible chez l’homme : celui de la dignité.

Des siècles après, la liberté ayant été rendue aux peuples et dans l’élan apparent d’un mea-culpa, pour faire profiter tous du progrès et de la modernité, de manière égalitaire, on décide alors d’abattre les frontières -les mêmes que les envahisseurs de jadis avaient placé pour mieux se partager l’usufruit des territoires colonisés- pour prétendument répondre aux aspirations des peuples pauvres, assoiffés de bien-être. Mais force est de constater aujourd’hui que la vraie raison –économique, en prévalence– est d’élargir leurs parts de marché. Ce sont là quelques réalités sur la globalisation prônée tambour battant depuis des décennies. Pis encore, tout observateur averti relèverait aisément qu’il s’agit encore de l’un des sens uniques les plus édifiants de l’histoire. Il suffit pour cela de remarquer qu’à l’ouverture commerciale des pays les plus pauvres aux produits des plus riches, ces derniers opposent une fin de non recevoir, du moins vis-à-vis des migrants en quête de travail et de prospérité. Quant à la modernité vantée inlassablement aux pays du tiers-monde, elle n’est pas la leur et reste bien loin du développement partagé. Elle ne fait que les enfoncer encore plus dans une addiction -frisant la toxicomanie- vis-à-vis des pays les plus développés. D’ailleurs, le progrès technologique qui leur est proposé reste le plus souvent surdimensionné par rapport à leurs vrais besoins, voire inadapté à leur mode de vie. Mais que faire, c’est le monde développé qui décide pour tous et qui décrète -à chaque nouvelle vague de modernité, et en même temps- les aspects de la modernité à venir, couplés avec les moyens idoines pour en maintenir dépendants ceux qui ne les produisent pas.

Les conséquences, nous les connaissons tous. Ils se traduisent par une « faillite éthique », assortie d’une « ruine environnementale ». Rien de plus normal, Ceux qui ne se préoccupent pas du futur -qui sera pourtant le présent de leurs enfants- récoltent la désolation.

Face à cette situation critique, l’humanité cherche des solutions alternatives pour se protéger des effets néfastes de l’économie marchande dénuée de tout humanisme, sans pour autant verser dans l’autre extrême, celui du « tout état », dont les effets sont bien connus.

Il fallait donc inventer une autre économie, se basant sur l’effort conjugué des communautés, pour produire des biens et des services qui leur sont accessibles, mais surtout adaptés. Voient alors le jour les coopératives, les mutuelles, les associations, les syndicats et les fondations, fonctionnant toutes sur des principes démocratiques d'égalité des personnes (1 personne, 1 voix), de solidarité entre les membres et d'indépendance économique mutuelle. C’est la naissance de l’économie sociale et solidaire (ESS), mue par des valeurs et une éthique, plaçant la solidarité au premier rang de ses préoccupations. Elle se veut avant tout centralisée sur l’homme.

Sa finalité est d’apporter des réponses aux demandes non satisfaites -tant par le secteur privé que par l’état-, de permettre l’intégration économique des populations marginalisées, de canaliser leurs efforts épars pour en faire une réelle force et un vrai contrepoids économique et social, capable de muter leur précarité en prospérité partagée. L’ESS ambitionne d’être une extension aux limites de fonctionnement du couple marché/état.